Une inflation élevée et des taux d’intérêt qui montent ont des effets nuancés sur les actions. Tout va dépendre du type d’activité de l’entreprise et notamment de sa capacité à majorer (ou pas) les prix de ses produits ou de ses services, et de son niveau d’endettement.
L’inflation a commencé à s’installer en France à l’été 2021. Elle a atteint en moyenne 4,9 % sur l’année 2023, contre 5,2 % en 2022, quand le chiffre moyen de 1999 à 2020 était de 1,4 %.L’inflation devrait poursuivre sa décrue au cours de l’année 2024. Mais si l’Insee prévoit une inflation à 2,6 %, sur un an en juin 2024, elle pourrait en réalité se situer autour de 3,4 % en moyenne annuelle en 2024.
En effet, la perte de productivité associée aux revalorisations salariales va continuer à augmenter les coûts salariaux des entreprises. Les tensions géopolitiques (conflit au Proche-Orient, troubles en mer Rouge, escalade entre la Russie et l’Ukraine) accroissent à nouveau les incertitudes sur l’évolution des prix du baril de pétrole et du gaz. Les attaques contre des navires commerciaux annoncent déjà, pour les prochains mois, une nouvelle flambée des tarifs du transport maritime – ce qui risque de freiner la baisse des prix de production – et des perturbations entraînant notamment un allongement des délais de livraison. Enfin, le coût de la transition écologique et la volonté de renouer avec une souveraineté industrielle sont générateurs d’inflation.
L’inflation ne disparaîtra donc pas en 2024. A quelques exceptions près, les prix devraient donc continuer d’augmenter. Ce contexte inflationniste retardera la baisse des taux directeurs de la BCE vers la fin de l’année 2024, soutenant à la hausse les taux obligataires.
La montée des rendements obligataires a plusieurs impacts. D’une part, les emprunteurs (États ou entreprises émettant les obligations) voient le coût de leur crédit augmenter. Pour les investisseurs, le rendement des obligations augmente. Pourtant, elles sont souvent moins risquées que les actions. Or, si le rendement des actions reste identique, on dit alors que la prime de risque diminue : l’écart de rémunération entre un actif risqué et un actif moins risqué baisse. Dans ce type de situations, certains actionnaires vendent des titres pour investir davantage dans les obligations. Si le mouvement est général, le prix des actions peut subir des corrections. Rapidement, les entreprises cotées doivent s’adapter et mieux rémunérer le risque avec des dividendes plus élevés.
Pour une entreprise, augmenter les dividendes est possible si les profits sont au rendez-vous. Toutefois, cela peut être compliqué quand l’inflation s’installe puisque les entreprises doivent faire face à l’augmentation du coût des matières premières, du coût de leur main d’œuvre et du coût de leur dette. Si les entreprises ne parviennent pas à répercuter toutes ces hausses dans leurs prix de vente, leurs profits baissent. Cela les freine dans l’augmentation de leurs dividendes. L’effet est négatif sur leur valorisation boursière.
En parallèle, les banques cotées en bourse peuvent souffrir de la perte de valeur de leurs portefeuilles obligataires. Pour combattre l’inflation, les banques centrales ont en effetaugmenté leurs taux directeurs. Les obligations nouvelles sont émises à des taux supérieurs à ceux des obligations anciennes. Les obligations anciennes voient leur valeur faciale baisser car leur rendement est moindre. Les investisseurs leur préfèrent les obligations nouvellement émises. Comme la hausse des taux a été très rapide en 2022-2023, la valeur des obligations passées dans lesquelles les banques ont investi une grande partie de leurs liquidités a chutébrutalement. Ce qui a provoqué des secousses de marché importantes, notamment en mars 2023 quand les banques californiennes ont dû vendre à perte leurs portefeuilles pour faire face aux demandes de retrait de leurs clients. Ces secousses de marché peuvent revenir à intervalles réguliers tant que les banques centrales ne baissent pas les taux directeurs, ce qui ajoutent encore à la complexité pour les entreprises cotées de maintenir leur valorisation boursière.
Dans cet environnement, les entreprises ayant peu recours à l’emprunt s’en sortent mieux que les sociétés endettées. Dans leurs coûts, elles subissent moins fortement le renchérissement du crédit que les autres. Elles génèrent ainsi de meilleures marges et voient leur valeur augmenter plus vite sur un marché boursier en quête de réassurance.